Parmigiano Per Tutti !

Parmigiano Reggiano D.O.P.

 

En toute objectivité, c’est le roi des fromages.

Je n’ai pas l’intention de tergiverser pendant des plombes. Il n’y a pas de matchs possible. C’est le marbre des dieux. Il est à nos papilles gustatives, ce que Elvis est au rock, ce que la Joconde est au Louvre, ce que le champagne est à la France, ce que l’Italie est à l’univers, ce que le soleil est à l’été français.

Surprenant mais jamais irritant, magnifique mais jamais envahissant. Simple mais jamais lassant. Et surtout quand il manque, nos vies sont froides, ternes, insipides et sans intérêt.

Et en plus il est beau, ce héros de la cuisine. Le gendre idéal.

Qui a fait connaître Parme et l’Emilie-Romagne dans le monde entier.

Un chef d’oeuvre tous les jours depuis neuf siècles.

Lire la suite

Il Risotto. Il Miracolo

Risotto ai Funghi

Il faut prendre ton temps. Ne pas improviser. Ne pas décevoir. Et surtout ce soir, où tu reçois le genre d’invité pour lequel tu t’es décarcassé longtemps, avant de savoir ce que tu allais bien pouvoir cuisiner pour lui faire honneur. Tu n’en as quasiment pas dormi depuis que tu sais qu’il sera à ta table. Si tu te plantes, tu pourrais t’en vouloir longtemps, parce qu’il ne revient pas si facilement, et pardonne rarement.

Cet invité il est dans ton verre. Dans une bouteille. Une bouteille d’Amarone, que tu as achetée et que tu regardes amoureusement. Comme l’a écrit Sand, l’Amarone, c’est un vin de temps. Donc tu as patienté. Longtemps. Et maintenant tu sais ce que tu vas faire. Pas une vulgaire entrecôte. Non.

Un Risotto.

Évidemment. Qui mieux que le risotto, sa crème divine et miraculeuse, son fondant, sa chaleur pourrait mieux servir l’Amarone? Oui, parce que cette fois, ce n’est pas le vin qu’on sert avec le plat. C’est le plat que tu vas servir avec l’Amarone.

Tu as posé la bouteille délicatement et en évidence dans ta cuisine, elle va trôner pendant tout ce temps où tu vas cuisiner. Et tu ne vas pas la quitter des yeux, pour que tu n’oublies pas que ce soir, c’est pour elle que tu cuisines. Avec Toi, Moi, et l’Italie entière à ses pieds.

Risotto, aussi, c’est un plat de temps. Il faut du temps. Il faut prendre du temps (1). Un Risotto ne peut pas être servi en moins de 20 minutes, et ne se prépare pas à l’avance. Répète après moi. Un Risotto ne peut pas être servi en moins de 20 minutes, et ne se prépare pas à l’avance. Encore une fois. Un risotto ne peut pas…

Il faut beaucoup d’attention. De la rigueur et de l’amour. Ne jamais prendre confiance. Une erreur d’inattention, ET C’EST LE DRAME. Donc tu ne te laisses pas distraire, tu vires tout le monde de ta cuisine, tu fais le silence autour de toi. C’est bon? On y va!

Pour un Risotto traditionnel, il te faut:

Petit a/ Du Riz. Carnaroli ou Arborio (ce sont les plus simples à trouver). Il existe d’autres variantes en Italie comme le Vialone, mais plus difficile à se procurer à un prix raisonnable en-dehors des frontières italiennes.

Celui que tu préfères, je n’ai pas de religion de ce coté là. Ce sont des riz ronds, il existe des cultures immenses dans le Nord en Italie, du Piémont à la Lombardie. Ce riz est parfait pour le risotto. Il fait de la bonne crème. A chaque fois que je vois cette petite crème, je me dis que c’est un miracle.

Petit b/ Des oignons

Petit c/ Du vin blanc plutôt sec

Petit d/ Du Parmigiano Reggiano

Petit e/ Du sel, du poivre, du beurre

Petit f/ Du bouillon.

Parlons-en du bouillon. Tu me jettes ces cubes tous préparés. Tu le fais toi-même. On t’avait prévenu que l’Amarone était un vin de temps. Il faut un bon pot-au-feu aux légumes ou au bœuf ou au poisson, c’est selon, et tu gardes bien le bouillon. (Ou alors la prochaine fois que ta mère fait un bouillon, tu le récupères et tu le congèles. Je nierai avoir écrit cette dernière phrase).

Petit g/ Une cuillère en bois

Petit h/ Une sauteuse, ou une poêle à bords hauts.

Bon maintenant que tu es prêt, on y va.

Pour les quantités, je n’en sais rien, je fais tout au pif. C’est dans les gènes que l’Italie m’a transmis, désolée. Je sais, tu en as marre de ne pas être Italien. Bonne chance. (Il parait qu’il faut 3 fois plus de bouillon que de riz, débrouille-toi avec ça.)

1. Donc déjà, tu fais bien bouillir le bouillon. Il faut que le bouillon soit bien bouillant quand tu vas en avoir besoin. Je ne peux pas le surveiller à ta place alors pour l’amour du ciel, désigne un préposé au bouillon.

2. Dans une casserole, tu fais fondre une noix de beurre sans le faire brûler. Donc à feu doux. Et tu fais revenir les oignons que tu auras coupés bien finement. Tu les fais revenir jusqu’à ce qu’ils deviennent transparents. Le secret du Risotto, c’est surveiller.

Tout, tout le temps. Ne pas se planter dans le timing. A tous les instants, tu as tout sous contrôle. Un peu comme les 20 minutes de ton examen du permis de conduire: les yeux dans les rétros, sur la route, devant, sur les cotés, partout, tout le temps.

3. Une fois que les oignons sont transparents, tu verses l’intégralité de ton riz Carnaroli – j’ai décidé que tu utiliserais du Carnaroli, voilà. Et là attention, tu vas suivre attentivement ce que je vais te dire.

4. Tu vas remuer délicatement le riz, bien l’imprégner du beurre et des oignons, et à partir de maintenant, tu ne cesseras PLUS JAMAIS de remuer. Quitte à passer pour un maniaque, tu ne lâches POUR AUCUNE RAISON cette cuillère en bois et tu remues. Pas frénétiquement, pas énergiquement, doucement, régulièrement, tout le temps, sans t’arrêter.

5. Une fois que ton riz est bien imprégné, hop, un verre de vin blanc. Tu mélanges, tu attends que le riz ait absorbé le vin.

Tu ne t’arrêtes pas de remuer. Je casserai une assiette par terre à chaque fois qu’un de tes grains de riz accrochera au fond de ta casserole.

Tu comprends, c’est important. L’Amarone te regarde. Tu regardes l’Amarone. C’est bon, tu as compris que c’était important.

6. Une fois que ton riz a bien absorbé le vin, louche par louche il faut verser le bouillon.

Bouillant.

Et pour qu’il reste bien bouillant, tu montes le feu du riz. Ça va s’agiter là-dedans, les petits grains ronds vont se faire masser, ils vont adorer.

Chaque louche. Tu laisses bien que le riz absorbe chaque louche.

Petit à petit.

Tout en remuant.

Ne faiblis pas.

Je te le confisque, l’Amarone, si tu faiblis.

Tu vas voir. Le miracle. Le riz va gonfler, prendre du volume. Et relâcher cette crème miraculeuse. J’ai vu des gens sortir leur pot de crème fraîche pour faire un risotto.

C’est parce qu’ils ne connaissent pas le Miracle.

Il Miracolo.

Il faut goûter de temps en temps le Carnaroli. Parce qu’il ne doit être, ni croquant, ni trop cuit. Il faut que le résultat ne soit ni liquide, ni compact. Il faut que ce soit crémeux. Il faut qu’il tienne sur ta fourchette.

S’il tient sur ta fourchette sans couler tout en étant liquide, tu as bon. Et oui. Pas facile.

Tu sais parfois, le Risotto ne te rend pas tous tes efforts. Tu penses avoir fait tout comme il faut, et le résultat n’est pas celui que tu attendais.

Il faut persévérer… Parce que l’Amarone le vaut bien.

7. Et tout ça en 18 minutes. Ni une de plus, ni une de moins. Donc ne te plante pas dans le timing des étapes. Le Secret. C’est pourquoi tu as intérêt à avoir bien fait absorber tout ton riz avec ton bouillon, parce qu’au bout de 18 minutes, je retire tout ça du feu.

Comme à l’examen du permis de conduire. Quand c’est fini, c’est fini. Tu ne peux pas revenir en arrière. Tu ne peux pas rattraper si tu t’es planté. Il faut que tu recommences.

Si ça peut te consoler, j’ai loupé 4 fois mon permis de conduire. Et maintenant je suis un As du Volant. Mais passons.

8. Tu retires du feu et tu rajoutes une noix de beurre.

Tu n’as pas cessé de remuer.

Tu mets une bonne poignée de Parmigiano Reggiano.

Tu continues de remuer.

Le Risotto, c’est un plat presque… asocial. Si tu as des invités, tu es obligé de les abandonner. Mais quand tu reviens, c’est il Miracolo dans leurs assiettes. Ce secret, avant de le livrer, tu vas attendre un peu. Parce que bon, tous ces efforts, hein, c’est quand même pas pour les jeter en pâture au premier venu.

9. C’est une des bases possibles du Risotto. Si tu sais faire ça, tu sais faire n’importe quel risotto. Pour l’Amarone, je te conseille des bons cèpes. Des bons Funghi Porcini, à la saveur forte, qui reste en bouche, qui embaume ta cuisine.

Tu les cuisines comme tu les aimes, et tu les rajoutes quelques minutes avant la fin de la cuisson, et tu saupoudres avec le Dieu Parmigiano.

Et n’oublie pas, l’Italie aime quand c’est joli. Alors tu gardes quelques cèpes pour les rajouter par dessus tout ça, directement dans les assiettes. L’Italie te remercie.

Tu sers les assiettes immédiatement, il Risotto n’attend pas.

Il Miracolo est bref, c’est un instant sacré, insaisissable. Crois-moi, tu ne commanderas plus jamais un Risotto au restaurant après ça.

Mais avant, sers-toi donc un bon verre d’Amarone. Il est perfetto ce Risotto, bravo. Il donne envie de rester à table jusqu’à 4h du matin pour refaire le monde.

J’espère que tu as prévu une deuxième bouteille d’Amarone.

Baci
@flonot

(1) Il faut atomiser les restaurants qui servent un risotto en moins de 20 minutes. Il faut aller en cuisine, et couper la main du «cuisinier», en pénitence. Si tu commandes un Risotto et qu’il arrive illico, cela signifie que CES BANDITS L’ONT PRÉPARÉ A L’AVANCE. Et ça, ça mériterait que je les envoie au fond de l’Adriatique accrochés à des parpaings. Pour donner à manger aux poissons. Et encore. Les pauvres poissons.